Voici la liste complète des romans et nouvelles de Jules Verne, dans l'ordre
chronologique, avec mes commentaires. Je n'ai pas tenu compte des pièces de théâtre,
des poèmes et autres écrits.
Cette bibliographie commentée a été reproduite avec mon autorisation dans le numéro 57 du
Journal littéraire,
"Spécial Jules Verne", en mai 2005. On y trouve d'excellents articles sur Jules Verne, de même
que quelques-uns de ses textes.
1. Les romans
Un prêtre en 1835
Ce roman de jeunesse, resté inachevé, a été publié sous le titre Un prêtre en 1839.
Il s'agit d'un roman noir mettant en scène un avocat et un prêtre maudit dans la ville de Nantes.
Jédédias Jamet ou L'Histoire d'une succession (1847)
Ce roman de jeunesse est resté inachevé. Seuls les trois premiers chapitres ont été écrits,
mais le canevas joint au manuscrit nous permet de nous faire une idée sur l'histoire :
Jédédias Jamet apprend le décès de l'oncle de sa femme, un riche négociant, et doit partir à
la recherche du frère du défunt, ce qui mènera le cupide héros à Rotterdam et en Amérique.
Voyage à reculons en Angleterre et en Écosse (1859)
Jacques et Jonathan, deux Parisiens, veulent visiter l'Angleterre et
l'Écosse. Le chemin pour s'y rendre sera long, car ils devront transiter
par Nantes et Bordeaux, d'où le qualificatif "à reculons", ce qui ne veut
pas dire que les Parisiens ont marché à reculons ! Le titre original de
ce roman est d'ailleurs Voyage en Angleterre et en Écosse. Le
manuscrit de ce roman inédit, qu'Hetzel avait refusé de publier en 1862, a
été retrouvé dans les archives de la Ville de Nantes. Il s'agit en fait d'un récit de voyage dans
lequel l'action et le côté scientifique manquent, mais où
il y a de l'humour et de l'ironie. Plusieurs pensent que ce roman raconte
le voyage de Verne aux mêmes endroits, en 1859. C'est le premier
roman "écossais" de Verne, avec Le Rayon
Vert et Les Indes noires. Là encore,
Verne peut démontrer toute son admiration pour l'écrivain
Walter Scott.
Paris au XXe
siècle (1860)
Ce roman se passe à Paris, en 1960. La Technique et la Finance
ont pris le contrôle, au détriment des Arts et de la Culture.
Les artistes et les intellectuels sont d'inutiles bouches à nourrir.
Michel Dufrénoy est un artiste intellectuel et doit faire son chemin
dans cette société qui ne veut pas de lui et de ses semblables.
Verne fait une critique de
la société française du milieu du 19e siècle
et la transpose cent ans plus tard. Pour bien apprécier, il faut
bien sûr connaître la France de 1860, d'où l'importance
de se procurer une édition avec des explications visant à
faciliter la lecture et la compréhension. On avait aucune trace de ce volume,
sauf quelques indices, comme par exemple
la lettre par laquelle l'éditeur Hetzel expliquait à Verne
son refus de publier ce roman. Les spécialistes de Verne en venaient
même à se demander si ce livre avait vraiment existé.
Ce n'est que bien des années après la mort de Verne que son
arrière-petit-fils retrouva le manuscrit dans son coffre-fort.
L'Oncle Robinson (1861)
Ce roman raconte comment la famille Clifton et le franco-américain Flip échouent sur une île déserte.
Contrairement au Robinson Suisse de Wyss, ils sont totalement dépourvus d'objets matériels
et n'ont que leur intelligence et leur débrouillardise. Il s'agit d'un roman inédit et inachevé,
car refusé par Hetzel vers 1870. Verne l'a plus tard utilisé pour rédiger la première partie de
L'Île mystérieuse.
Le Comte de Chanteleine (1862)
Un roman politique qui se passe pendant la Guerre de Vendée (1793-1796), une
insurrection anti-révolutionnaire. Le comte de Chanteleine voit sa famille se faire
décimer par des révolutionnaires, menés par le méchant Karval. Avec son fidèle Kernan,
il fuit et entreprend de se venger. C'est un bon cours d'Histoire, dans lequel on évoque
notamment La Terreur, Robespierre, Danton, etc.
Cinq semaines en ballon : Voyage de découverte
en Afrique par trois Anglais (1862)
Le Docteur Fergusson, son ami Kennedy
et son domestique Joe entreprennent la traversée en ballon du continent
africain, sur les traces des explorateurs du continent noir. Le roman qui a
lancé la carrière de Verne en 1863. Le lecteur apprend la
géographie de l'Afrique et l'histoire de ses principaux explorateurs
et suit au passage un cours d'aérostation.
Voyages et aventures du Capitaine Hatteras (1863-1864)
La première partie s'intitule Les Anglais au Pôle Nord
; la seconde, Le désert de glace. Il est donc aisé
de savoir où se déroulent les aventures d'Hatteras. Le Capitaine
John Hatteras a un seul rêve : atteindre le Pôle
Nord, pour la plus grande gloire de l'Angleterre. Malheureusement pour
lui, son équipage l'abandonne en chemin et, avec quelques fidèles,
il doit lutter pour survivre, au milieu de la neige, de la glace et du
froid. Il rencontre un explorateur américain, Altamont, et doit
lui concéder, à lui et aux États-Unis, une partie
de sa gloire. Dans son manuscrit, Verne faisait mourir Hatteras dans un volcan,
mais Hetzel préférait le voir survivre, quitte à ce qu'il soit fou.
Voyage au centre de la Terre (1864)
Le professeur Lidenbrock trouve un document dans lequel il apprend l'existence
d'un volcan éteint dont la cheminée pourrait le conduire
jusqu'au centre de la Terre. Accompagné de son neveu Axel
et du guide Hans, il se rend au volcan Sneffels, en Islande, et s'engouffre
dans les entrailles de la Terre. Ils ne tarderont pas à faire
d'étonnantes découvertes.
De la Terre à la Lune : Trajet direct en
97 heures (1864-1865)
Trois hommes prennent place à bord d'un gigantesque obus devant
être projeté vers la Lune par un non moins gigantesque canon,
la Columbiad. Les Américains Barbicane et Nicholl et le Français
Ardan réussiront-ils à vaincre l'attraction terrestre ? Le nom du personnage
Ardan a fait couler beaucoup d'encre : il s'agit
de l'anagramme de Nadar, qui était un aéronaute et photographe
français, ami de Verne. Le cinéaste français Georges
Méliès a fait l'adaptation cinématographique la
plus célèbre de ce roman, Le voyage dans la Lune, en 1902.
Les enfants du capitaine Grant. Voyage autour du monde (1865-1867)
Ce roman se compose de trois parties : Amérique du Sud, Australie et Océan Pacifique.
Lord Glenarvan et son équipage naviguent sur le voilier
Duncan. Ils trouvent à l'intérieur de l'estomac d'un requin qu'ils
viennent de pêcher une bouteille contenant un message de désespoir
envoyé par le Capitaine Grant. Le message est rongé par l'humidité
et plusieurs détails manquent, mais il est clair que le désespéré
se trouve quelque part sur le 37e parallèle. Avec les enfants du
disparu, ils entreprennent un long voyage autour du monde, le long du 37e
degré de latitude, ce qui les amènera à traverser
l'Amérique du Sud, l'Australie et la Nouvelle-Zélande, où
ils seront faits prisonniers par des cannibales. Ce n'est bien sûr
que dans les dernières pages que sera retrouvé le Capitaine
Grant. Un des personnages les plus drôle de l'univers de Verne est le
professeur Jacques Paganel, un Français très distrait au
point de s'embarquer sur le mauvais navire et d'apprendre le portugais
en pensant que c'était de l'espagnol. Ce savant se fait le porte-parole
de Verne lors de conversations portant sur la géographie et l'histoire
des pays visités. Plusieurs des personnages reviennent dans
L'Île mystérieuse, dont le méchant Ayrton.
Vingt mille lieues sous les mers. Tour du monde sous-marin (1866-1869)
Qui n'a jamais entendu parler du Capitaine Nemo et de son sous-marin, le Nautilus
!? Après que leur navire eut été coulé par
le Nautilus, le professeur Aronnax, son valet Conseil et le harponneur
canadien (il vient de Québec !) Ned Land sont recueillis à
bord du sous-marin. La cage est dorée, mais ils sont prisonniers
et doivent suivre le capitaine Nemo dans son périple autour du monde
sous-marin, avec toutes les découvertes que cela implique, dont
l'Atlantide et quelques trésors. C'est par l'électricité
que Verne justifie la super-puissance et l'autonomie du Nautilus. Ce
roman a été porté
plusieurs fois à l'écran, le film mettant en vedette Kirk Douglas en
étant la
plus célèbre adaptation cinématographique. Le Capitaine Nemo revient dans L'Île
mystérieuse et bien des choses sont alors expliquées.
Autour de la Lune (1868-1869)
La suite de De la Terre à la Lune. Après avoir
placé des hommes sur orbite lunaire, Verne se devait de les faire
revenir sur Terre. Cette suite, écrite en 1870, n'est pas très convaincante.
Bien sûr, le lecteur pourra approndir ses connaissances lunaires
et balistiques, mais sans plus. On aurait dit que Verne se sentait obligé
de faire revenir sur Terre les héros de De la Terre à la Lune.
Était-ce nécessaire ?
Une ville flottante (1869)
La ville flottante, c'est le Great-Eastern, un énorme navire
faisant la traversée Liverpool-New York, à bord duquel se
trouvent plusieurs centaines de personnes, avec leur caractères
différents. Une vraie société. Le personnage principal
du récit en est le narrateur, dont nous ignorons le nom. Son rôle
consiste surtout à décrire ce qu'il voit, comme tout bon
narrateur ! Fabian Mac Elwin prend place à bord du navire. Il est inconsolable
à la suite d'une histoire d'amour qui a mal tourné : celle
qui avait été sa fiancée, Ellen, a été
mariée contre son gré au méchant Harry Drake. Le hasard
fait bien sûr en sorte que Drake et Ellen se trouvent aussi sur le
navire. À la suite d'un prétexte futile, Drake et Mac Elwin
se battront en duel à l'épée, dont l'issue sera déterminée
par un vrai coup de foudre, l'un des duellistes ayant malencontreusement
levé bien haute son épée métallique pendant
un orage. Arrivé à New York, le narrateur et l'excentrique Dean
Pitferge se rendent jusqu'aux chutes du Niagara, avant de rembarquer à
bord du Great-Eastern à destination de Liverpool. Ce livre est tiré
des notes du voyage que fit lui-même Jules Verne en 1867. C'est d'ailleurs
pourquoi je me permets de qualifier Une ville flottante de "notes
de voyages romanisées".
Le Chancellor (1870-1874)
Le Chancellor, navire de commerce, quitte Charleston en direction de Liverpool. Mené par un capitaine
souffrant d'aliénation mentale, le navire vogue vers le sud-est au lieu du nord-est. Et quand le feu
prend dans la cale, remplie de balles de coton, rien ne va plus. Le second, Kurtis, prend les commandes,
mais le navire finit par sombrer. Les passagers et membres d'équipage prennent place à port d'un radeau
de fortune. Mais la fin et la soif les font souffrir et plusieurs meurent. Ils en sont même rendus à
procéder à un tirage au sort qui déterminera lequel des survivants sera sacrifié afin que les autres
puissent le manger, mais c'est à ce moment qu'ils atteignent l'embouchure de l'Amazone, dont le fort
courant repousse l'eau salée à plus de 20 milles au large. Ils sont enfin sauvés. Il semble que la première
version de ce roman ait été beaucoup plus atroce que la version finalement publiée, l'éditeur Hetzel
trouvant que le roman était d'un "réalisme répugnant", ce qui n'est pas peu dire.
Aventures de trois Russes et de trois Anglais dans
l'Afrique australe (1870)
Afrique du Sud, 1854 : trois savants russes
et trois savants anglais ont pour mission de mesurer un arc de méridien. Si une
amitié profonde unit William Emery et Michel Zorn, une grande rivalité sépare
Mathieu Strux et le colonel Everest, co-dirigeants de la mission anglo-russe.
Une mauvaise nouvelle vient cependant agrandir le précipice entre eux : le
déclenchement de la Guerre de Crimée, opposant notamment la France et
l'Angleterre à la Russie. Pour survivre, ils devront s'unir. Verne fait dire au
colonel Everest, à la fin du chapitre 18 : "(...) ici, il n'y a plus ni
Russes, ni Anglais ! Il n'y a que des Européens unis pour se défendre !"
Réussiront-ils leur opération de triangulation ? Telle est l'intrigue de ce
roman qui nous fait marcher sur les traces du docteur David Livingstone.
Le pays des fourrures (1871-1872)
En 1859, des officiers de la Compagnie de la Baie d'Hudson sont chargés
d'aller fonder un fort au nord du 70e parallèle, au-delà
du cercle polaire. Le fort est établi sur le Cap Bathurst, qui semble
être le lieu parfait. Malheureusement, ce cap n'est pas fait de terre,
mais de glace, et lors d'une éruption volcanique, le cap se détache
du continent et part à la dérive, emportant tous ses occupants
avec lui. Ça se gâte encore plus quand arrive le printemps
et que le glaçon commence à fondre...
Le tour du monde en quatre-vingts jours (1872)
Pour les besoins d'un pari, le très flegmatique Britannique Phileas
Fogg et son valet français, le débrouillard Passepartout,
entreprennent le tour du monde et doivent le compléter en moins
de 80 jours. Ils sont retardés dans leur projet par l'inspecteur
Fix, lancé aux trousses de Fogg, convaincu que celui-ci est l'auteur
d'un cambriolage, ainsi que par les événements dans les divers
pays qu'ils traversent. Pensez-vous qu'ils réussiront ? Ce roman, l'un
des plus célèbres de Verne, a inspiré plusieurs films.
L'Île mystérieuse (1873-1874)
Trois parties composent ce chef-d'oeuvre : Les Naufragés de l'air, L'Abandonné
et Le Secret de l'île. La première partie a été rédigée d'après le
manuscrit de L'Oncle Robinson, roman écrit vers 1861 et rejeté par Hetzel.
Rassemblés autour de l'ingénieur Cyrus Smith, cinq américains
font naufrage sur une île déserte, après leur évasion
en ballon pendant la Guerre de Sécession. Contrairement à
Robinson Crusoé qui avait pu récupérer divers biens
et objets de son navire, les cinq héros sont totalement dépouillés
et ils n'ont que leur intelligence et leurs habiletés pour survivre.
Un des personnages de Les Enfants
du Capitaine Grant se joint à eux bientôt à eux
et ils passent plusieurs années sur cette île. Cependant,
de mystérieux phénomènes et d'extraordinaires coïncidences
demeurent inexpliqués, jusqu'à ce que le Capitaine Nemo,
héros de Vingt mille
lieues sous les mers, fasse son apparition.
Michel Strogoff. De Moscou à Irkoutsk (1874-1875)
Ce roman raconte l'histoire d'un courrier spécial
du tsar de Russie, qui doit traverser les steppes de Sibérie, pour
aller prévenir le frère du tsar de la présence d'un
traître dans son entourage. Son voyage de plus de 5500 km sera compromis
par les Tartares, qui envahissent la Sibérie, et, bien sûr,
par le traître lui-même, à la solde des Tartares. Ce roman était
originalement intitulé Le Courrier du Tzar. C'est l'oeuvre de Verne qui a le
plus inspiré les cinéastes.
Hector Servadac. Voyages et
aventures à travers le monde solaire (1874-1876)
Hector Servadac et quelques autres terrestres, dont le professeur Palmyrin
Rosette, se retrouvent sur une comète après que celle-ci
eut frôlé la Terre, lui arrachant au passage quelques habitants,
un peu d'atmosphère, de l'eau, etc. Ils entreprennent alors un long voyage
de deux ans dans le système solaire. Un des personnages du roman est le
commerçant juif Isac Hakhabut : tous les défauts de l'humanité
semblent s'être retrouvés
dans cet homme. Hakhabut est un personnage méprisant, ne pensant
qu'à faire de l'argent, même sur une comète se trouvant
à plusieurs millions de lieues de la Terre. Je ne crois pas que
Verne aurait pu se permettre un tel personnage s'il avait écrit
son roman à l'époque actuelle : rectitude politique
oblige... Il a d'ailleurs reçu une lettre de protestation du rabbin Zadoc Khan.
Et en passant, qu'obtenez-vous en lisant "servadac" de droite à gauche ?
Les Indes noires (1876-1877)
Les "Indes noires", ce sont les houillères d'Écosse. L'overman
Simon Ford vit avec sa famille dans une mine de houille abandonnée,
convaincu que le gisement n'est pas complètement épuisé.
Mais quelques phénomènes inexplicables se produisent. Des
personnes auraient-elle intérêt à ce que la mine ne
rouvre jamais ? Il s'agit ici de second roman "écossais" de Verne, après
Voyage à reculons en Angleterre et en Écosse ; il y aura ensuite
Le Rayon vert.
Un capitaine de quinze ans (1877-1878)
Dick Sand, quinze ans, est novice sur le brick-goélette Pilgrim.
À la suite d'un accident lors d'une chasse à la baleine,
le capitaine Hull et tous les membres de son équipage périssent.
Dick Sand prend donc les commandes du navire, dans l'espoir d'en ramener
les passagers sains et saufs. À la suite de manoeuvres du traître
Negoro, le navire suit une fausse route : croyant accoster la Bolivie,
Sand et ses passagers se retrouvent plutôt en Afrique, en plein milieu
de l'Angola, là où la traite des esclaves fait la richesse
de quelques trafiquants et de rois indigènes. Sand et ses compagnons
sont tôt faits prisonniers par les complices de Negoro. La quête
de la liberté sera parsemée de nombreuses épreuves...
Ce roman est une dénonciation en règle
de l'esclavagisme. Verne ne donne pas dans la dentelle quand il sonne la
charge contre les négriers et contre les pays qui, à l'époque
où fut écrit ce roman, pratiquaient ou toléraient
l'esclavage. Certains passages sont très violents et sanguinaires.
Bien sûr, Verne ne faisait que décrire ce qui se passait,
sans rien inventer, mais j'imagine mal un enfant lire ce livre. Au passage,
Verne fait la nomenclature des explorations du continents africain, consacrant
un chapitre entier au docteur Livingstone et au journaliste Stanley.
Les tribulations d'un Chinois en Chine (1878)
Kin-Fo est un jeune homme riche, mais qui se retrouve subitement ruiné.
Ne pouvant supporter la pauvreté et n'étant pas capable de
mettre fin à ses jours, Kin-Fo propose un marché à
son maître, le philosophe Wang : celui-ci devra tuer Kin-Fo. En échange,
Wang héritera du produit de l'assurance-vie de Kin-Fo, laquelle
est assez élevée. Wang accepte et promet de remplir le "mandat"
qui lui est confié. Quelque temps plus tard, Kin-Fo apprend qu'il n'est pas ruiné du tout !
Il relève alors Wang de
sa promesse, mais celui-ci ne l'entend pas ainsi : il veut remplir le mandat
qui lui a été confié (et il veut sans doute empocher
l'assurance-vie). Kin-Fo doit donc poursuivre Wang à travers la
Chine pour le convaincre qu'il ne veut plus mourir. Continuellement menacé
d'être tué à tout instant par Wang, Kin-Fo comprend
la valeur de la vie. Morale de l'histoire : c'est quand on est malade qu'on apprécie
la santé. Un film mettant en vedette Jean-Paul Belmondo a été tiré
de ce roman.
Les 500 millions de la Bégum (1878)
Le Français Sarrasin hérite de 500 millions de francs,
mais il doit partager cette somme avec l'Allemand Schultze, l'auteur d'un
mémoire intitulé Pourquoi tous les Français sont-ils
atteints à des degrés différents de dégénérescence
héréditaire ? Le ton du livre est lancé. Chacun des
deux héritiers va concevoir et construire une ville
"idéale" en Orégon. Les deux villes sont très différentes,
celle de Schultze étant davantage une vaste usine d'armement qu'une
ville, tandis que la ville française est un exemple de développement
urbain. Le but de Schultze est bien sûr de détruire la ville
rivale, conçue par un Français dégénéré.
Ce roman avait été à l'origine écrit par André Laurie (Paschal Grousset) : Hetzel en
avait racheté le manuscrit pour le confier à Jules Verne, qui le reprend à sa manière.
Verne y démontre de l'hostilité
face aux Allemands : quelques années auparavant, Bismarck avait
mené l'Allemagne à la victoire sur la France de Napoléon
III, lors de la guerre franco-prusse de 1870-1871. À la suite de
cette défaite, la France fut amputée de l'Alsace et la Lorraine.
Verne prit part à cette guerre en tant que garde-côte au Crotoy
: la défaite française fut ainsi un peu la sienne et c'est
sans doute pourquoi les Allemands n'ont pas le beau rôle dans ce
roman. Le personnage de Schultze évoque un peu Hitler : bien sûr,
Jules Verne ne connaissait pas le Führer, celui-ci n'étant
devenu célèbre qu'une quinzaine d'années après
la mort de Verne. Mais les ressemblances sont frappantes.
La maison à vapeur. Voyage à travers l'Inde septentrionale (1879)
L'histoire se passe en Inde en 1867 : le colonel Munro achète une étrange machine, un éléphant à vapeur
traînant deux pagodes roulantes, afin d'entreprendre avec ses amis un voyage touristique en Inde,
pays pacifié et sous contrôle britannique. Mais son voyage vise aussi à retrouver le chef de la résistance
indoue, le cruel Nana Sahib, avec qui il a un compte à régler à la suite de la Révolte des Cipayes de 1857,
au cours de laquelle Nana Sahib assassina Lady Munro. Et justement, Nana Sahib veut lui aussi se venger car
Munro a tué sa compagne, la rani de Jansi ! Ce roman devait à l'origine porter le titre
L'éléphant à vapeur, mais Hetzel préférait la maison.
La Jangada. Huit cents lieues sur l'Amazone (1880)
Une jangada est un train de bois, un vaste radeau, utilisé en
Amérique du Sud. C'est sur ce genre d'embarcation que Joam Garral
et toute sa famille descendront le cours de l'Amazone, afin de marier sa
fille à Bélem, à l'embouchure du fleuve. Chemin faisant,
nous apprenons que Joam Garral se nomme plutôt Joam Dacosta et que
23 ans plus tôt, il avait été condamné à
mort pour un crime qu'il n'avait pas commis ; il avait réussi à
s'échapper et à fuir au Pérou, là où
il a mené une vie très respectable. Le méchant Torrès
détient un parchemin crypté qui prouve l'innocence de Garral,
ce parchemin ayant été écrit par le véritable
coupable peu avant qu'il ne meure. Torrès veut monnayer ce parchemin
et épouser la fille de Garral, déjà promise à
Manoel. Garral refuse et Torrès se venge en dénonçant
Garral aux autorités. Joam est alors arrêté et l'exécution
de la sentence n'est plus qu'une question de jour. Benito, le fils de Joam,
tue Torrès en combat singulier, sans savoir que celui-ci détient
le parchemin et qu'il connaît la clé qui permettra de le déchiffrer.
Retrouver le cadavre de Torrès et le parchemin ne sera pas une mince
affaire. Et quand le document aura été trouvé, il
faudra le déchiffrer. Heureusement, le juge Jarriquez, grand amateur
de rébus, charades, etc., saura décrypter le document et
suspendre la sentence juste avant qu'elle ne soit exécutée.
L'histoire se terminera non pas par un, mais deux mariages. Un très
long roman ; l'action ne s'installe véritablement
qu'à partir du moment où Garral est arrêté.
Le roman contient bien sûr une description presque complète
de la géographie de la région amazonnienne, ainsi qu'un relevé
des diverses explorations. Verne cite à plusieurs reprises la nouvelle
Le Scarabée d'or, d'Edgar Poe, auteur qu'il qualifie d'ailleurs de
"grand génie analytique". On se souviendra que Verne appréciait cet
auteur américain et qu'il s'est même permis de faire une suite
à Les aventures d'Arthur Gordon Pim, soit Le Sphynx des Glaces.
L'école des Robinsons (1881)
Godfrey Morgan est le neveu du riche William Kolderup. Âgé
de 22 ans, il mène une vie oisive. Au cours d'un voyage, lui et
son professeur de danse et de maintien, T. Artelett (dit Tartelett), font
naufrage et se retrouvent sur une île déserte, où ils
doivent se débrouiller pour vivre. Sauf que ce naufrage est "arrangé"
et c'est l'oncle William qui tire les ficelles. Ce roman n'est pas le meilleur de
Verne, mais il se lit bien. Tartelett nous fait bien rire par son petit côté
"précieuse ridicule".
Le Rayon Vert (1881)
Qu'est-ce que le rayon vert ? Une nouvelle arme puissante ? Non : il
s'agit du dernier rayon lancé par le soleil au moment où
il se couche sur l'océan. Ce rayon, vert bien sûr, n'est visible
que pendant une infime fraction de seconde, et encore faut-il que le ciel
soit dégagé de brume et d'une pureté parfaite. Et
d'après une vieille légende née au pays des Highlands,
la personne qui peut voir ce rayon "ne peut plus se tromper dans les choses
dans les choses du sentiment ; c'est que son apparition détruit
illusions et mensonges ; c'est que celui qui a été assez
heureux pour l'apercevoir une fois, voit clair dans son coeur et dans celui
des autres." Sib et Sam Melvill, deux vieux écossais, sont les oncles de Miss
Helena Campbell, qui est orpheline, comme c'est d'ailleurs bien souvent
le cas dans les romans de Jules Verne. Sib et Sam aimeraient qu'elle épouse
Aristobulus Ursiclos, un jeune pédant qui ne voit que le côté
scientifique des choses. C'est ainsi qu'il décrit la mer comme étant
"une combinaison chimique d'hydrogène et d'oxygène, avec
deux et demi pour cent de chlorure de sodium". Il va sans dire qu'Helena
n'est pas éprise du tout d'Aristobulus et, pour gagner du temps,
elle déclare vouloir voir le Rayon Vert. Ses oncles feront tout
en leur possible pour la satisfaire et aussi pour lui faire changer d'idée
en ce qui concerne Aristobus. Mais Olivier Sinclair, un jeune artiste,
viendra mêler les cartes. Helena verra-t-elle le Rayon Vert ? Qui
épousera-t-elle à la fin du roman ? Devinez... Du Jules Verne
différent. L'auteur ridiculise la science et donne le beau rôle
à l'art. "Le Rayon Vert", c'est tout simplement une histoire d'amour
qui sert de prétexte à Verne pour se rappeler ses souvenirs de
voyages en Écosse.
Kéraban le têtu (1882)
Quel homme têtu que le turque Kéraban ! Pour ne pas avoir
à payer un droit de passage pour traverser le Bosphore (détroit
séparant l'Europe de l'Asie et reliant la mer Noire à la
mer de Marmara), il décide de faire le tour de la mer Noire, entraînant
avec lui son ami hollandais Van Mitten et le valet de ce dernier, Bruno
: tout un voyage pour sauver 10 paras, soit quelques centimes. Le voyage
coûtera beaucoup plus cher à Kéraban, mais il aura
la satisfaction de ne pas payer la taxe. Bien sûr, Kéraban
et ses amis rencontreront différents obstacles, plusieurs personnes
ayant intérêt à ce qu'ils ne parviennent pas à
Scutari.
L'archipel en feu (1883)
Tout sur l'accession à l'indépendance de la Grèce
au 19e siècle, vue à travers l'histoire de Nicolas Starkos,
un pirate grec qui capture et vend ses compatriotes comme esclaves sur
les marchés africains. Il trouvera sur sa route le Français
Henry d'Albaret, lieutenant de vaisseau de la marine royale, venu appuyer
la cause de l'indépendance grecque. Starkos et d'Albaret sont aussi
rivaux pout l'amour de la belle Hadjine Elizundo, laquelle préférera
d'Albaret, au grand dam de Starkos. Pas beaucoup d'action dans ce roman,
sauf dans les derniers chapitres, lors de l'affrontement entre la bande de
pirates de Starkos et l'équipage de d'Albaret. Par contre, Verne pousse
à fond sa narration des événements ayant mené à
l'indépendance acquise par la Grèce sur la Turquie. Pourtant,
il n'y a pas beaucoup de Turcs dans la rivalité opposant Starkos à d'Albaret...
L'Étoile du Sud. Le Pays des diamants (1883)
Afrique du Sud : l'ingénieur minier Cyprien Méré veut épouser Miss Watkins, mais John Watkins, son
père, refuse car Méré n'est pas assez riche. Méré se lance alors dans la confection d'un diamant
artificiel, avec lequel il pourra obtenir la main de sa bien-aimée. Il réussit, mais le diamant est
volé. Méré et quelques autres partent à la recherche du suspect, dans le Transvaal. C'est finalement
dans le gésier d'une autruche que sera retrouvé l'inestimable joyaux. Méré peut alors épouser Miss
Watkins, après avoir rendu justice à un misérable juif qui avait été floué par John Watkins. Mais ce
diamant, au juste, est-il vraiment artificiel ? L'idée de ce roman n'est pas de Jules Verne :
comme pour Les 500 millions de la Bégum, l'éditeur Hetzel en avait acheté le manuscrit
à Paschal Grousset (André Laurie), pour ensuite le confier à Verne afin qu'il le remanie.
Mathias Sandorf (1883-1884)
Mathias Sandorf est un comte hongrois se battant contre la domination autrichienne. Trahi, il
est capturé et condamné à mort, mais il réussit à s'échapper en traversant la mer Adriatique
à la nage. Quinze ans plus tard, sous le nom du riche Docteur Antékirtt, Sandorf revient et se
venge de ceux qui l'ont trahi. Il retrouvera au passage sa fille qu'il croyait morte. Cette histoire
ressemble beaucoup au Comte de Monte-Cristo d'Alexandre Dumas, à qui Jules Verne dédie justement
son roman.
L'épave du Cynthia (1884)
Erik Hersebom est un jeune norvégien doté d'une remarquable intelligence. Il y
a cependant quelque chose qui cloche en lui : il n'a pas du tout les traits
physiques caractéristiques des peuples slaves. Il a toute l'apparence d'un
celte. Le docteur Schwaryencrona le prend sous son aile et finit par découvrir
qu'Erik a été adopté par une famille de pêcheurs norvégiens, après avoir
été sauvé du naufrage du Cynthia alors qu'il n'avait que quelques
mois. Avec la bénédiction de sa famille adoptive et avec l'aide du docteur
Schwaryencrona, il entreprend de découvrir le secret de ses origines. Ce sera
l'occasion pour lui de devenir le premier à réussir un voyage circumpolaire. Ce
roman n'est pas réellement de Jules Verne : l'auteur original est André Laurie (Paschal Grousset),
modeste écrivain dont l'oeuvre est généralement dénuée d'intérêt littéraire.
Jules Verne a réécrit l'histoire imaginée par Laurie, lui ajoutant son style bien à lui,
mais Laurie a pu co-signer l'oeuvre, contrairement à deux autres romans que Verne a signés
seul, L'Étoile du Sud et Les 500 millions de la Bégum. Étant le fruit d'une
collaboration, L'épave du Cynthia est hors-série et ne fait pas partie des
Voyages extraordonaires.
Robur le Conquérant (1885)
Uncle Prudent et Phil Evans sont respectivement président et
secrétaire du Weldon-Institute de Philadelphie, mais aussi d'intimes
ennemis. Le Weldon-Institute est un club rassemblant tout ceux pouvaient
s'intéresser à l'aérostatique, "mais amateurs enragés
et partculièrement ennemis de ceux qui veulent opposer aux aérostats
les appareils plus lourds que l'air". Ces "ballonistes" en sont à se disputer
la meilleure manière de diriger un aérostat, lorsqu'un homme, Robur,
fait irruption dans la salle de séance du Weldon-Institute : il provoque la
fureur de ses membres en disant que l'avenir appartient non pas aux ballons, mais
aux machines volantes. Pour prouver ses dires, il enlève Prudent et Evans et
les embarque à bord de l'Albatros, une machine volante digne du
Nautilus. Robur commence un périple autour du monde, prouvant à
Prudent et Evans qu'une machine volante mue par l'électricité se
contrôle beaucoup mieux qu'un ballon. Le personnage de Robur revient dans
Maître du Monde (1904).
Un billet de loterie (1885)
Hulda, une jeune norvégienne, attend fébrilement des nouvelles de son fiancé Ole Kamp, parti à la pêche
en haute mer. Le navire est malheureusement porté disparu. Hulda reçoit cependant un message d'adieu
qu'Ole a eu le temps d'écrire avant que ne sombre le navire. Ce message, écrit au verso d'un billet de
loterie d'un tirage prochain, avait été enfermé dans une bouteille jetée à la mer.
Et si ce billet de loterie était chanceux ? C'est ce que pensent beaucoup de gens qui veulent l'acheter,
même à prix d'or. Hulda sera-t-elle riche ? Et reverra-t-elle son fiancé ? Qu'en pensez-vous ?
Nord contre Sud (1885-1886)
L'action de ce roman se passe dans le sud des États-Unis, en
pleine Guerre de Sécession. James Burbank possède une vaste
plantation en Floride et de nombreux Noirs y travaillent librement, Burbank
les ayant affranchis de leur condition d'esclavage. Les voisins de Burbank,
dont le très méchant Texar, ne l'entendent pas ainsi et le
soupçonnent de sympathie pour l'Armée nordiste. Burbank aura
fort à faire pour défendre sa plantation, sa famille et lui-même
contre Texar, en attendant que les "fédéraux, nordistes,
anti-esclavagistes, unionistes" ne viennent prendre le contrôle
de la Floride. Verne se montre résolument anti-esclavagiste. Il laisse
également voir toute l'admiration qu'il a pour le peuple américain.
Le chemin de France (1885)
L'histoire se passe en 1792. Pendant que Natalis Delpierre, un soldat de l'armée française, est
en Prusse pour visiter sa soeur, la guerre éclate entre la France et la Prusse ; Delpierre et ses
amis doivent alors trouver le moyen de rentrer en France. Comme dans Les 500 millions de la Bégum,
Jules Verne déverse tout son fiel contre les Allemands, qu'il décrit presque tous comme des gueux.
Deux ans de vacances (1886-1887)
Dans la préface, Jules Verne s'explique : d'après lui, beaucoup de
livres ont déjà
présenté des personnages isolés sur une île,
que ce soit l'homme seul (Robinson Crusoé, de Defoe), la
famille (Robinson Suisse, de Wyss), la société (Le
cratère, de Cooper), les savants (L'Île mystérieuse,
de Verne lui-même), en plus d'un Robinson de 12 ans, le Robinson
des glaces, le Robinson des jeunes filles, etc.:
Malgré le nombre infini des romans qui
composent le cycle des Robinsons, il m'a paru que pour le parfaire, il
restait à montrer une troupe d'enfants de huit à treize ans,
abandonnés dans une île, luttant pour la vie au milieu des
passions entretenues par les différences de nationalités,
- en un mot, un pensionnat de Robinsons.
D'autre part, dans le Capitaine de quinze ans,
j'avais entrepris de montrer ce que peuvent la bravoure et l'intelligence
d'un enfant aux prises avec les périls et les difficultés
d'une responsabilité au-dessus de son âge. Or, j'ai pensé
que si l'enseignement contenu dans ce livre pouvait être profitable
à tous, il devait être complété.
L'un des principaux personnages se nomme Briant. Il semble que Jules Verne
se soit inspiré du nom de son ami Aristide Briand, homme politique
français
Famille Sans-Nom (1887-1888)
L'histoire des Patriotes canadiens-français lors des Troubles
de 1837-1838, vue par Verne. Pour les besoins de son roman, Verne crée
de toutes pièces un personnage, Jean Morgaz, qui est à la
tête des Patriotes. Verne ne peut malheureusement changer le cours
de l'Histoire et la rébellion sera écrasée. Ce n'est pas un roman
majeur de Verne, mais un de ceux qui peut le plus
intéresser les lecteurs du Québec. Dans ce récit écrit
en 1888, Verne place à la tête des Patriotes le jeune Jean
Morgaz, fils du traître Simon Morgaz. Tous les personnages historiques
ayant pris part à la Rébellion sont dans le roman, à
commencer par Papineau. Verne décrit aussi les lieux, comme St-Eustache,
St-Denis, Montréal, Québec, etc.
Sans dessus dessous (1888)
À l'origine Le monde renversé, ce roman est le fruit d'une collaboration avec
Badoureau, un mathématicien, qui a eu l'idée de départ et qui a cédé son travail à Verne.
Nous retrouvons les personnages de De la Terre à la Lune vingt ans plus tard : ils
veulent pouvoir, à l'aide d'un gigantesque canon, faire basculer la Terre sur son axe de
rotation, le but étant de réchauffer le pôle nord. Une erreur de calcul fera heureusement
échouer l'expérience.
Le château des Carpathes (1889)
L'histoire se passe en Roumanie. Les habitants du village de Werst sont
terrifiés par des manifestations surnaturelles entourant le château
voisin, supposément abandonné depuis des années. Quelques
braves auront le courage de monter au château pour en éclaircir
le mystère. Bien sûr, l'électricité aura son
rôle à jouer et expliquera bien des phénomènes...
César Cascabel (1890)
Les Cascabel sont des saltimbanques français ; après quelques années passées aux États-Unis,
ils décident de revenir en France. Malheureusement, ils se font voler l'argent durement gagné
et doivent oublier le bateau. Ils choisissent donc de passer par l'Alaska, le détroit de Behring
glacé, la Sibérie et la Russie. Se joignent à eux un exilé politique russe et une jeune indienne,
ainsi que les habituels bandits. Rien de génial, rien d'extraordinaire, mais un roman amusant et léger.
Mistress Branican (1890)
Dolly Branican est la femme du capitaine John Branican. En 1875, celui-ci quitte
San Diego à destination de Calcutta, à bord du Franklin. Quelques temps
après, le nourisson de Dolly meurt noyé. La pauvre femme perd la raison sous
le choc. Le temps s'écoule et on reste sans nouvelles du navire, qui est
considéré perdu. Quand Dolly retrouve la raison, 4 ans plus tard, elle apprend
la disparition de son mari, mais refuse de se croire veuve. Elle organise donc
une série d'expéditions destinées à retrouver son mari. C'est finalement en
Australie qu'elle le libérera de la tribu des Indas, plus de 15 ans après sa
disparition. Elle se découvrira aussi un fils, né pendant sa folie.
Ce roman rappelle un peu Les
enfants du Capitaine Grant, surtout parce qu'une partie de l'histoire se
déroule en Australie. L'héroïne, Mistress Branican, y fait preuve d'un très
grand courage et d'une détermination sans faille.
Claudius Bombarnac (1891)
Claudius Bombarnac est un journaliste français prenant place à bord du "Grand Transasiatique", train
reliant l'Europe à la Chine. Plusieurs personnages secondaires, passagers du train, agrémentent
ce récit. Parmi eux, le baron allemand Weissschnitzerdörfer, qui entreprend le tour du monde en...
39 jours. Autre clin d'oeil à son oeuvre, Verne fait allusion à l'adaptation théâtrale de son
roman Michel Strogoff. Mis à part une attaque par des bandits, il n'y a pas beaucoup
d'action dans ce roman, dont l'intérêt principal repose sur les caractères des personnages
de diverses nationalités qui peuplent le train au cours du long trajet.
P'tit-Bonhomme (1891)
L'histoire se passe en Irlande. P'tit-Bonhomme est un orphelin à la vie misérable. Recueilli
par un fermier, il vit quelques années de bonheur, mais la Grande Famine de 1846-1848 anéantit
cette vie. P'tit-Bonhomme est de nouveau seul et, à force de travail, il réussit à s'enrichir
et il peut récompenser ceux qui l'ont soutenu dans son enfance. Il n'y a pas beaucoup d'action dans
ce roman : Verne y dépeint surtout les paysages irlandais et les différentes classes sociales
côtoyées par P'tit-Bonhomme. Cette oeuvre aurait été inspirée de Dickens.
Mirifiques aventures de Maître Antifer (1892)
L'histoire d'une chasse au trésor, où les indices, arrivant par bribes, mèneront
Pierre Servan Malo de St-Malo à la Tunisie, au golfe de Guinée, puis à Édimbourg,
ensuite au Spitsberg et enfin au large de la Sicile.
L'île à Hélice (1893)
Quatre musiciens français en tournée aux Etats-Unis sont embarqués contre leur gré sur
Standard Island, une gigantesque île artificielle et mobile peuplée de milliardaires. Débute alors
un long périple d'un an sur les eaux du Pacifique, pendant lequel les péripéties ne manqueront
pas : une invasion de fauves, des pirates, des cannibales, etc. Mais à cause de la bêtise humaine,
l'île se disloquera. Bien sûr, il y aura quand même un mariage à la fin ! Verne ne situe pas
exactement cette histoire dans le temps : Dans le cours de cette année-là -- nous ne saurions
la préciser à trente ans près -- les États-Unis d'Amérique ont doublé le nombre des étoiles du
pavillon fédératif (...) après s'être annexé le Dominion of Canada (...), les provinces mexicaines,
etc. Verne nous surprend en décrivant quelques-uns des appareils utilisés sur l'île, notamment
le télautographe, qui n'est rien de moins qu'un télécopieur, un fax !
Un drame en Livonie (1893, revu en 1903)
L'histoire d'une erreur judiciaire survenue dans les pays baltes. Le
professeur Dimitri Nicolef est accusé du meurtre du caissier des
frères Johausen, riches banquiers d'origine allemande qui détiennent
une grosse créance contre Nicolef, d'origine slave. Toutes les apparences
sont contre le pauvre Nicolef. Seuls ses amis et les membres de sa famille
doutent de sa culpabilité. Ce qui n'arrange rien, c'est que les
frères Johausen sont les ennemis politiques de Nicolef, lequel est
retrouvé mort à la suite de ce qui semble être un suicide,
ce qui constitue un aveu. Or, quelques temps après, le véritable
meurtrier, mourant, avoue ses crimes : les meurtres du caissier Poch et
de Nicolef. Ce livre a été écrit pendant
la célèbre affaire Dreyfus, affaire judiciaire très
délicate, mais ne fut publié qu'en 1904. D'après Jean
Jules-Verne, "ce récit
comporte une autre démonstration ; celle de l'acharnement mis par
un clan politique à perdre ses adversaires". Les Frères Kip
porte aussi sur les conséquences d'une erreur judiciaire.
Le Superbe Orénoque (1894)
L'Orénoque est un long fleuve qui coule au Vénézuela. Jean de Kermor entreprend de remonter ce fleuve
à sa source, afin de retrouver son père, le colonel de Kermor, disparu depuis quatorze ans. Jean de
Kermor est accompagné de son oncle, le grincheux sergent Martial (mais sont-ils vraiment neveu et
oncle ?). En cours de route, ils feront connaissance avec les explorateurs français Jacques Helloch et
Germain Paterne. Ils devront éviter de tomber sur la bande d'Alfaniz, un redoutable évadé du bagne
qui est l'ennemi personnel du Colonel de Kermor. Ce roman a été terminé en 1894, mais Jules Verne
l'a laissé mûrir dans ses tiroirs pendant près de 4 ans. Ce n'est qu'en 1898 qu'est publié ce
récit de voyage. Car c'est bien ce qu'est Le Superbe Orénoque, qualifié par Jean Jules-Verne
de "récit de voyage, émaillé d'incidents qui le rendent attrayant."
Face au drapeau (1894)
Thomas Roch est un inventeur devenu fou ; il a inventé un puissant explosif, mais son pays, la France,
ne veut pas le lui acheter. Roch le vendra alors au plus offrant, le pirate Ker Karraje. À la fin du
roman, Roch redevient lucide et, pour ne pas commettre de crime de lèse-patrie en détruisant un navire
de guerre arborant le pavillon tricolore français, provoque une explosion qui le tue, avec la
bande de pirates. Ce roman a valu à Verne un procès de la part de l'inventeur français Turpin. Ce dernier
avait inventé en 1885 un explosif qu'il n'avait pas réussi à vendre au gouvernement français, et il
avait ensuite été emprisonné. Même si Verne ne se cache pas pour dire que son roman est inspiré de
"l'Affaire Turpin", la poursuite de Turpin est rejetée.
Clovis Dardentor (1895)
Clovis Dardentor est un riche industriel, fort en gueule, à qui
tout réussi. En visite en Algérie, où il doit "arranger"
le mariage de l'insignifiant Agathocle Désirandelle avec la charmante
Louise Elissane, il fait la connaissance de deux orphelins venus s'engager
dans la Légion étrangère, Marcel Lornans et Jean Taconnat,
lesquels aimeraient bien, l'un se faire adopter par Dardentor, l'autre
épouser la belle Louise. Un long périple en Algérie
sera pour chacun des personnages l'occasion d'arriver à ses fins. Clovis Dardentor, écrit en 1896, c'est l'occasion de découvrir
l'Algérie française du 19e siècle, de manière
beaucoup plus approfondie qu'avec Tartarin de Tarascon, de Daudet,
qui se passait aussi en Algérie. La pièce de théâtre
jointe à Clovis Dardentor traite principalement du même propos,
soit le mariage et le travail effectué par un tiers pour le favoriser.
Dans la version parue en 1979 dans la collection 10/18, Union Générale
d'Éditions, l'éditeur a joint à cette oeuvre un vaudeville de Verne,
Un neveu d'Amérique ou Les deux Frontignac, et a donné au
tout un sous titre, soit L'art de se marier.
Le Sphinx des Glaces (1895)
Notre ami Jules va loin cette fois-ci : il compose une suite à un roman d'un autre
auteur, l'Américain Edgar Allan Poe. Et quelle suite ! Jeorling, le narrateur, a lu et relu
Les aventures de Gordon Pym et, naturellement, il est persuadé qu'il ne s'agit que
d'une fiction issue de l'imagination de Poe. Mais il ira de découvertes en découvertes et
d'étonnements en étonnements ! Citons ici Jules Verne, dans une note à Hetzel :
J'ai pris pour point de départ un des plus étranges romans d'Edgar Poe, Les aventures de Gordon Pym,
qu'il ne sera point nécessaire d'avoir lu. J'ai profité de tout ce que Poe avait laissé d'inachevé et du
mystère qui enveloppe certains de ses personnages. Une idée très heureuse m'est venue, c'est qu'un de mes
héros, qui croyait comme tout le monde que le roman était une fiction, se trouve face à face avec une
réalité (...)
Je crois personnellement que si la lecture du livre
de Poe n'est pas un préalable, elle est à tout le moins fortement recommandée.
Le Village aérien (1896)
Deux chasseurs, un Américain et un Français, accompagnés de leur guide et d'un enfant, s'aventurent
dans la Grande Forêt, sise en Afrique centrale et réputée impénétrable. Ils retrouveront l'équipement
du Docteur Johausen, disparu depuis quelques années alors qu'il étudiait les signes. Les héros seront
ensuite guidés jusqu'à un village situé à 100 pieds dans les airs, sur la cime des arbres. Ce village
est peuplé par les Wagdis, desquels on peut se demander si ce sont des singes supérieurs ou des
hommes inférieurs... D'abord désigné sous le nom de La Grande Forêt, ce livre est n'a été
publié qu'en 1901. Verne adopte la théorie de l'évolution de Darwin et semble considérer les Wagdis
comme le "chaînon manquant". Pour cela, Le Village aérien n'a pas dû plaire à ceux qui croient
que Dieu a fait l'homme à son image...
Seconde patrie (1896)
Une suite au roman de Johann David Wyss, Le Robinson suisse. Il vaut mieux avoir lu l'original au préalable...
Le testament d'un excentrique (1897)
William J. Hypperbone, l'un des plus éminents membres de l'Excentric Club
de Chicago, vient de mourir, laissant une fortune de 60 millions de dollars et
aucun héritier ! Son testament cause tout un émoi dans la ville des Chicago,
sur tout le territoire américain et dans le monde entier : il lègue toute sa
fortune à celui des six participants choisis au hasard qui gagnera une partie
basée sur les règles du "Noble Jeu de l'Oie" et qui s'intitule
"Le Noble Jeu des États-Unis" : en prenant tous les états
américains d'alors, en y ajoutant le District de Columbia et le territoire
indien, et en répétant 14 fois l'Illinois, on obtient 63 cases, comme dans le
Jeu de l'Oie. Le jeu sera mené par le notaire Tornbrock, qui jetera les dés à
chaque deux jours et qui enverra ainsi les participants d'un état à l'autre,
le gagnant étant celui qui arrivera le premier à la 63e case. Bien sûr, il y
a des pièges. Deux de ces participants, Lissy Wag et Max Réal, se marieront à
la fin de la partie ; le journaliste Harris T. Kimbale attirera un peu de notre
sympathie, mais il en sera tout autrement des antipathiques Hermann Titbury, un
vieil avare, et Hodge Urrican, de même que de l'imbécile Tom Crabbe, boxeur de
son état. Mais qui est ce 7e participant, le mystérieux XKZ, ajouté par
Hypperbone dans un codicille de dernière minute ? Et qui gagnera la partie et
les 60 millions de dollars ? Impossible de ne pas connaître les États-Unis à
fond après avoir lu ce roman : la plupart des états sont décrits par Jules Verne
comme lui seul en a l'habitude. Et pour la inième fois, Jules Verne nous fait
une belle description des chutes Niagara. Ce roman est l'un des plus amusants de la
bibliographie de Verne, mais l'histoire prend cependant du temps à prendre son
envol, car Verne place minutieusement ses personnages. Il prend aussi trois
chapitres pour décrire les funérailles d'Hypperbone, ce qui est assez long.
En Magellanie (1897-1898)
Imaginez la situation : vous êtes un anarchiste misanthrope jusqu'au
plus profond de votre âme et vous vivez reclus sur une île.
Un jour, un navire échoue et vous en sauvez les nombreux passagers
et membres d'équipage, lesquels s'installent sur votre île
et vous reconnaissent comme leur chef. Contre votre gré, vous édictez
des lois, construisez une prison, donnez des ordres, etc. C'est ce que
doit vivre le Kaw-Djer, un mystérieux personnage offrant quelques
ressemblances avec le Capitaine Nemo. Ce roman a été écrit
par Jules Verne, mais ne fut publié que quatre ans après sa mort,
soit en 1909, sous le titre Les naufragés du Jonathan après avoir
été largement modifié par son fils Michel, qui a
supprimé plusieurs chapitres et en a ajouté d'autres.
Le secret de Wilhelm Storitz (1898, revu en 1901)
L'histoire de ce roman se passe à Budapest, en 1757. Le Français
Henri Vidal est venu rejoindre son frère, Marc Vidal, lequel doit
épouser la jolie Myra Roderich. Son rival malheureux et frustré,
le méchant Wilhelm Storitz, décide de tout faire pour empêcher
ce mariage, même à utiliser un secret que son père,
alchimiste, lui a légué : le secret de l'invisibilité.
Il profite de son invisibilité pour faire peur à la crédule
et superstitieuse population hongroise : il déchire l'avis de mariage,
vole la couronne nuptiale et, ce qui est le pire, rend Myra invisible.
Il mourra, sans avoir dévoilé le secret. Comment donc rendre
Myra de nouveau visible ? Ce livre a été publié seulement en 1910, soit cinq ans
après la mort de Verne, non sans avoir été modifié par Michel Verne.
Plusieurs voient en ce livre une réponse au roman The Invisible Man,
de Herbert-Georges Wells, paru quelques années plus tôt, et qui inspira plusieurs films.
Les Frères Kip (1898)
L'histoire d'une terrible erreur judiciaire, où des bandits de la pire espèce, Fling Balt et
Vin Mod, assassinent le capitaine Gibson, commandant du navire James-Cook. L'affaire est
bien montée et ce sont les frères Karl et Pieter Kip qui seront accusés et condamnés à mort pour
ce meurtre. Ce n'est qu'à la lueur d'un fait nouveau que les Kip pourront enfin retrouver leur
liberté et leur honneur. Ça ressemble un peu à Un drame en Livonie, écrit
à la même époque. Ce livre est paru en 1902. Verne se serait inspiré de l'affaire des Frères
Rorique-Degraeve, saga judiciaire de la fin du 19e siècle. On y voit que si Jules Verne peut
faire de très longues descriptions géographiques, il peut aussi résumer très succintement
les phases d'action : c'est surtout le cas à la toute fin de la première partie, alors que
Verne résume en moins d'une page la tentative de rébellion organisée par Fling Balt.
Les histoires de Jean-Marie-Cabidoulin (1899)
Le Saint-Enoch est un baleinier commandé par le capitaine Bourcart et
dont l'équipage est composé d'une trentaine de personnes. Le navire quitte le
Havre à destination de l'océan Pacifique, d'abord dans les parages de la
Nouvelle-Zélande, puis de la côte américaine et, enfin de la Mer d'Okhotsk.
La pêche à la baleine est tantôt remplie de succès, tantôt lamentable. Et
la présence d'un navire rival battant pavillon anglais, le Repton,
n'aide en rien à améliorer les choses. Le capitaine Bourcart doit aussi
composer avec le tonnelier Jean-Marie Cabidoulin, qui affole l'équipage avec
ses histoires de gigantesques serpents marins. Et si Jean-Marie Cabidoulin
avait raison ? Le titre original de ce roman était Le Serpent de mer.
Bourses de voyage (1899)
Des écoliers visitent les Antilles à bord du navire Alert, sans se douter que son équipage, mené par le
capitaine Harry Markel, est constitué de meurtriers en fuite. Markel veut se débarasser de ses jeunes passagers
et leur voler les importantes bourses de voyage qu'ils ont méritées, mais il devra attendre le bon moment. Jules
Verne en profite pour détailler les principales iles antillaises : histoire, géographie, économie, etc.
Le volcan d'or (1899-1900)
Ben Raddle et Summy Skim sont deux cousins vivant à Montréal.
Leur oncle Josias Lacoste étant décédé au Klondike,
Ben et Summy héritent du claim de ce dernier. Ils traversent le
Canada et atteignent Dawson-City. Ils retrouvent et exploitent le claim
de leur oncle, mais à la suite d'un tremblement de terre, leur claim
est englouti sous les eaux et devient inexploitable. Ben et Summy doivent
passer le glacial hiver à Dawson-City. Jacques Laurier, un Français,
est retrouvé mourant par Summy Skim. Avant de mourir, il confie
à Ben Raddle un secret : il a trouvé un volcan rempli d'or,
où il suffit de se pencher pour ramasser les pépites. Ben
et Summy partent à la recherche du volcan et le trouvent. Malheureusement,
le volcan entre en éruption et crache tout son or dans l'océan
Actique... L'expédition des deux cousins tourne donc à l'échec
total. Comme dans la plupart des romans de Verne, il y a un méchant
: il y en a même deux. Il s'agit de Hunter et Malone, deux prospecteurs
américains, qui deviennent vite les rivaux et ennemis de Ben et
Summy. Il est à noter que pour une rare fois, les Américains
n'ont pas le beau rôle dans l'univers de Verne !!! L'auteur ne semble pas
démontrer beaucoup d'appréciation pour l'or, citant même Virgile :
auri sacra fames (la maudite soif de l'or). J'ai la chance d'avoir lu la version
originale de ce livre, dont le manuscrit a été retrouvé il y a quelques
années chez les descendants de l'éditeur Hetzel, et non pas la version
édulcorée par Michel Verne, laquelle était jusqu'alors la seule connue.
Le Beau Danube jaune (1901)
Ilia Krusch est un paisible pêcheur hongrois qui décide
de suivre le cours du Danube depuis sa source jusqu'à la mer Noire
et de ne vivre durant son périple que du fruit de sa pêche.
Au moment de débuter son périple en barque, un homme, M.
Jaeger, demande à Ilia Krusch de le prendre comme passager. Krusch
accepte, sans savoir que M. Jaeger est en réalité le policier
Karl Dragoch, dont la mission consiste à mettre le grappin sur le
contrebandier Latzko. Tout va bien jusqu'au moment où Krusch est
pris pour Latzko et emprisonné. Bien sûr, Krusch sera libéré
et le véritable Latzko, arrêté. Ce roman a d'abord été
publié sous le titre
Le Pilote du Danube, après que Michel Verne y eut apporté
de considérables modifications. Jules Verne avait écrit un
roman léger et portant sur la description du Danube et sur la pêche,
le tout pimenté d'une histoire de contrebande en toile de fonds
et où l'action ne se passe que dans les derniers chapitres. Selon
Olivier Dumas, président de la Société Jules Verne,
qui signe la préface dans l'édition parue chez Stanké,
en 1997, "Michel Verne n'apprécie pas du tout la bonhommie paisible
et souriante de l'oeuvre de son père. D'un roman léger et
ironique, il fera une sombre aventure policière, sans humour."
Le phare du bout du monde (1901)
Cette histoire se déroule en 1859-1860, à l'extrême
sud dela Terre de Feu. Afin d'éviter un naufrage aux voiliers qui
passent par là, un phare a été construit sur l'île
des États, située à l'extrême sud de l'Amérique,
là où le Pacifique et l'Atlantique entrent
en collision. Trois gardiens sont chargés de veiller au fonctionnement
de ce phare, situé en terre inhabitée et inhospitalière.
Les trois gardiens ignorent cependant qu'une bande de pirates, menés
par Kongre et son bras-droit Carcante, sévissent sur cette île
et pillent les navires qui s'y échouent, n'hésitant pas à
en massacrer l'équipage. Deux des gardiens sont assassinés
par les pirates et le troisième, le vieux Vasquez, s'enfuit et recueille
un naufragé américain, John Davis. Ensemble, ils vont tenter
d'empêcher les pirates de quitter l'île en attendant l'arrivée
du navire militaire Santa-Fé. Ce livre n'a été
publié qu'après la mort de Verne, ayant, comme pour les autres oeuvres
posthumes de Jules Verne, subi plusieurs modifications apportées par Michel Verne,
mais j'ai la chance d'avoir lu la version originale. Ce tragique récit a
été écrit pendant une période de dépression de
Jules Verne, causée par son état de santé. Le ton de l'oeuvre
s'en ressent et Jules Verne semble avoir omis d'inclure des scènes amusantes, comme il
avait l'habitude de le faire. Le récit est très bien ficelé,
mais le ton est sombre.
La chasse au météore (1901)
Un météore s'approchant de la Terre est découvert
simultanément par deux astronomes amateurs de Whaston, en Virginie,
MM. Hudelson et Forsyth. Leur rivalité pour s'approprier la découverte
du météore causera bien du soucis aux familles de ces deux
astronomes amateurs, notamment à Francis Gordon, le neveu de de
Forsyth, qui doit épouser Jenny Hudelson, la fille de l'autre. Mais
quand on découvrira que le météore est constitué
d'or, c'est toute la planète qui voudra s'en approprier. Son orbite
ayant été modifiée par une mystérieuse machine
du non moins mystérieux Zéphyrin Xirdal, le métérore
tombera au Groenland. Qui mettra la main sur ce fabuleux trésor ? Le mariage,
un thème cher à Jules Verne, occupe une place
importante dans ce roman. Outre le mariage compromis du neveu de Forsyth
et de la fille de Hudelson, nous assistons au mariage, au divorce et au
remariage de Seth Stanfort et Arcadia Walker. Ce roman, lui aussi modifié
par Michel Verne, a été publié en 1908, après la mort de Jules Verne. Il s'agit du
troisième roman où Verne parle de la fièvre de l'or, après En Magellanie et
Le Volcan d'Or.
L'invasion de la mer (1902)
En creusant un canal depuis la Méditerranée, un ingénieur veut créer une mer intérieure
dans le Sahara, ce à quoi s'opposent les tribus nomades du désert.
Ce roman portait à l'origine le titre Mer saharienne, mais Hetzel n'aimait pas !
Maître du Monde (1902-1903)
John Strock est un policier américain à qui est confiée
une mission : trouver la cause de mystérieux événements
s'étant produits au Great-Eyry, dans les Appalaches. Il fait vite
le lien avec l'apparition plusieurs fois signalée d'un appareil
capable de se mouvoir sur l'eau, sous l'eau, sur la route et dans les airs,
à une vitesse alors prodigieuse. Cet appareil, c'est l'Épouvante
et son créateur n'est nul autre que Robur le Conquérant.
Mais Robur n'est plus celui qui, dans Robur le Conquérant,
disait que l'humanité n'était pas assez sage pour profiter
des progrès de la science. Il a plutôt sombré dans
la folie. Ce livre, publié seulement en 1904, devait à l'origine s'intituler
Maître après Dieu, puis Avatars d'un Policeman Américain.
Robur y a un rôle somme toute secondaire, n'apparaissant en fait que dans les
derniers chapitres du livre, pour donner la clé de l'énigme. Le lecteur
notera la différence de ton et de style entre les
deux oeuvres dans lesquelles apparaît Robur : Maître du
Monde, qu'aucun élément d'humour ne vient pimenter, est
beaucoup plus sombre que Robur le Conquérant. Pour plusieurs,
cette différence de ton s'explique par les problèmes de santé
de l'auteur vieillissant, ainsi que par certains événements
dramatiques ayant ponctué sa vie entre les deux oeuvres (blessé
par balle par son neveu, mort de son ami et éditeur Hetzel, mort
de sa mère, etc.)
Voyage d'études (1903)
Une Commission parlementaire française est envoyée au Congo afin de décider si la colonie doit
être représentée au Parlement par un sénateur et un député. Jules Verne n'a pu achever ce roman,
n'étant rendu qu'au début du 5e chapitre. Son fils Michel a cependant repris l'idée et parachevé
l'oeuvre de son père, sous le titre L'étonnante aventure de la mission Barsac.
2. Les nouvelles
Plusieurs de ces nouvelles ont été éditées dans des recueils : Le Docteur Ox (1874)
et Hier et demain (1910).
L'Amérique du Sud. Études historiques
Les premiers navires de la marine mexicaine
Reprise sous le nom Un drame au Mexique, cette nouvelle raconte l'insurrection des
équipages de deux navires espagnols, et la vente de ces deux navires à la jeune Confédération
mexicaine. Bien sûr, les meneurs de l'insurrection seront châtiés. Cet essai a été écrit
au début de la carrière de l'auteur.
Un voyage en ballon
Repris sous le nom Un drame dans les airs : un vol en ballon tourne mal, alors qu'un
passager s'introduit dans la nacelle et prend le contrôle de l'aérostat. Ce fou furieux
finit par se jeter dans le vide. Dans ce récit, écrit en 1852, Verne fait la nomenclature des
principales catastrophes aéronautiques de l'époque, et conclut en souhaitant que "ce terrible
récit, en instruisant ceux qui me lisent, ne décourage donc pas les explorateurs des routes
de l'air". Heureusement qu'il nous prévient, car son récit n'a vraiment rien d'encourageant !!!
L'Amérique du Sud. Moeurs péruviennes
Repris sous le nom Martin Paz. Lima, au Pérou : trois classes sociales, Indiens, Métis et
Espagnols, rivalisent de haine et de mépris
l'une pour les autres. L'Indien Martin Paz rivalise avec le Métis André Certa pour l'amour de Sarah,
la fille du vil juif Samuel. Les autres Indiens ne pardonnent pas à Paz cette "trahison". Martin Paz
et Sarah mourront finalement ensemble, alors que le canot dans lequel ils prennent place s'engloutit
dans le tourbillon d'une cataracte, dans une finale qui ressemble à celle de
Famille Sans-Nom... Cette nouvelle a été écrite en 1852, alors que Verne
n'avait pas encore développé le style qu'on lui connaît.
Pierre-Jean
Nouvelle datant de la jeunesse de Jules Verne et modifiée par Michel Verne, à la demande de
l'éditeur Hetzel. Publiée sous le titre La destinée de Jean Morenas, la version de
Michel raconte l'histoire d'un homme évadé de prison, après y avoir été
enfermé pour un crime qu'il n'a pas commis ; son évasion est facilitée par le
réel auteur du crime. La version originale de Jules Verne raconte l'évasion de Pierre-Jean,
aidé par le fils d'une vieille femme qu'il a aidée quelques années auparavant ; Jules Verne en profite
pour souligner les problèmes du système carcéral d'alors.
Maître Zacharius ou l'horloger qui avait perdu son âme
Publié sous le nom Maître Zacharius. Un horloger voit ses montres cesser de fonctionner
l'une après l'autre, pour d'inexplicables raisons.
Comme il vit au rythme de ses montres, il se sent dépérir.
Survient un personne bizarre qui offre à Zacharius de lui dire comment
dompter ses montres, à condition qu'il lui donne sa fille en mariage.
Un récit bizarre dont la première version a été
rédigée en 1854.
Un hivernage dans les glaces
Un homme part à la recherche
de son fils disparu prè du Groënland. L'expédition sera
dangereuse et une partie de l'équipage se révoltera, mais
Verne a très tôt commencé à nous habituer à
des "happy ending". Cette nouvelle, écrite en 1855, est un brouillon
de Les aventures du Capitaine Hatteras et de Les chasseurs de
fourrure : les héros passeront au travers des mêmes épreuves,
comme une attaque d'ours polaires, un ensevelissement sous la neige, le
froid intense, une révolte de l'équipage, le scorbut, etc.
Le siège de Rome
Écrite vers 1860, cette nouvelle raconte comme l'armée française a réussi à prendre la
ville de Rome lors du siège de 1849, afin de remettre la pape Pie IX sur son trône. Verne
y ajoute une histoire fictive parallèle, celle du capitaine Français Henri Formont qui veut sauver
son épouse Marie, enlevée par le traître Andreanni Corsetti. La fatalité sera au rendez-vous.
Le mariage de M. Anselme des Tilleuls. Souvenir
d'un élève de huitième
Le marquis Anselme des Tilleuls, 27 ans, est plutôt laid et faible d'esprit. Son noble titre -et
la rente qui va avec- lui vient de son ancêtre Rigobert, qui avait, près de 1000 ans auparavant,
soigné l'indigestion du roi Louis le Bègue avec une simple feuille de tilleul. Malgré son rang, il
lui sera difficile de trouver une épouse, malgré les efforts en ce sens du professeur Naso Paraclet,
latiniste distingué et mentor du marquis. Cette nouvelle ironique et parfois grivoise aurait été
écrite vers 1855, alors que Verne n'était pas encore marié.
San Carlos
Le capitaine San Carlos est un contrebandier espagnol voulant faire entrer de la marchandise
prohibée en France. Pourchassé par le brigadier François Dubois et son équipe de douaniers, il
réussira tout de même à berner ses poursuivants. Cette nouvelle a été écrite vers 1865 mais est
longtemps restée inédite.
Les forceurs de blocus
L'histoire se passe en 1862, pendant le Guerre de Sécession.
La ville de Charleston, peuplée de sudistes, est assiégée
par les forces nordistes. Le capitaine James Playfair, commerçant
britannique, voit là l'occasion de s'enrichir : avec son puissant
navire, le Delphin, il veut forcer le blocus du port de Charleston
et livrer une cargaison d'armes aux sudistes, en échange de coton
qu'il pourra revendre en Grande-Bretagne . Au cours de la traversée
vers les États-Unis, une passagère réussit à
convaincre Playfair de remplir une mission encore plus périlleuse,
soit celle de délivrer son père, prisonnier des sudistes.
Que ne ferait pas James Playfair pour les beaux yeux de Miss Jenny Hallyburtt...
Une récit très court, habilement raconté mais
qui ne réserve pas de grandes surprises. Les forceurs de blocus
est une nouvelle agréable à lire dans laquelle Verne évite
les détours et ennuis qu'il réserve habituellement à
ses héros et qui font augmenter le nombre de pages de ses romans. Cette
nouvelle a été publiée en 1871, avec Une ville flottante. À l'origine, son
titre était Étude de moeurs contemporaines. Les forceurs de blocus.
Moeurs américaines. Le Humbug
Le Humbug raconte l'histoire d'un industriel américain
qui fonde une sorte d'Exposition universelle, une entreprise colossale.
Le gigantesque chantier est arrêté par la découverte
d'un squelette géant, lequel attire de très nombreux curieux,
prêts à payer pour avoir un souvenir du Humbug !
Une fantaisie du Docteux Ox
Les habitants de la ville de Quiquendone
sont depuis des siècles des gens pacifiques, très calmes,
très lents, voire même gazants. Mais depuis quelques
temps, le calme plat fait place à l'énervement généralisé
: des batailles, des discussions viriles, une déclaration de guerre
à la ville voisine, etc. Le Docteur Ox aurait-il quelque chose à
voir dans ce changement d'attitude ?
Une ville idéale
Les révoltés de la Bounty
La véritable histoire, peut-être un peu romanisée, de la mutinerie de la Bounty, en 1789.
Prenant bien soin de nous préciser que le récit n'est point une fiction, Jules Verne raconte la
mutinerie, comment les victimes s'en sont sorties et ce que sont devenus les mutins.
Dix heures en chasse
Un court récit narratif, dans lequel Jules Verne raconte les mésaventures de sa
première et seule journée de chasse : il n'aime visiblement pas les chasseurs !
Avant d'être publié par Hetzel en 1882, ce texte a d'abord été une causerie effectuée
le 18 décembre 1881 à l'Académie des Sciences, des Belles-Lettres et des Arts d'Amiens.
Frritt-Flacc
Un récit bizarre. Le docteur Trifulgas, homme cupide, est mandé pour aller soigner un
misérable qui se meure. Lorsqu'il se décide enfin à faire son devoir, il a toute
une surprise en voyant le misérable en question !
La famille Raton
L'histoire de rongeurs qui finissent par devenir humains, après
avoir traversé toutes les étapes de l'échelle e la
création. Un conte de fées pour jeunes enfants.
Gil Braltar
Menés par l'Espagnol Gil Braltar, des singes réussissent presque à s'emparer de la forteresse de
Gibraltar. Grâce à la ruse du général Mac Kackmale (ça sonne comme "macaque", non ?), la
Grande-Bretagne conserve sa possession.
La journée d'un journaliste américain en 2889
Une vision très futuriste des États-Unis, pays devenu la
puissance mondiale. L'Angleterre est même une colonie américaine
!!! La première version de cette nouvelle a été
écrite par Michel Verne, le fils de Jules, puis révisée
par le paternel. Michel en a ensuite fait une 3e version, celle que l'on
connaît. Il y a plusieurs rapprochements à faire avec Paris
au XXe siècle, une autre vision futuriste de Verne.
M. Ré-Dièze et Mlle Mi-Bémol
Maître Effarane est un facteur d'orgue qui s'offre pour réparer
l'orgue de Kalfermatt et pour y installer un registre de voix enfantines,
quitte à enfermer des enfants dans les tuyaux de l'orgue.
Édom
Reprise sous le titre L'Éternel Adam, c'est une nouvelle très sombre, une
fable sur la naissance et la mort d'une société, puis la
naissance d'une autre société. Un savant du futur trouve
le journal de bord d'un homme du 20e siècle, lequel raconte la survie
d'un groupe d'hommes à la suite d'un cataclysme. Ces hommes dépouillés
étaient tout ce qui restait alors de l'Humanité et ce sont
eux qui sont à l'origine de la société futuriste dont
fait partie le savant. Verne suppose que notre société actuelle
a été bâtie par les survivants d'un cataclysme qui
aurait détruit une civilisation antérieure, notamment l'Atlantide,
et que l'Humanité est une succession de civilisations bâties
sur les ruines d'une civilisation précédante.
3. Les romans de Michel Verne parus sous le nom de Jules Verne
Michel Verne a modifié plusieurs romans de son père, à la demande d'Hetzel. Il en a même écrits
quelques-uns lui-même, sous le nom de son père.
In the Year 2889
Texte originalement commandé à Michel par Jules Verne.
L'Agence Thompson and Co.
Le phare du bout du Monde
La version originale de Jules Verne est maintenant publiée sous le même titre.
Le volcan d'or
La version originale de Jules Verne est maintenant publiée sous le même titre.
La chasse au météore
La version originale de Jules Verne est maintenant publiée sous le même titre.
Le pilote du Danube
La version originale de Jules Verne est maintenant publiée sous le titre Le Beau Danube Jaune.
Les naufragés du Jonathan
La version originale de Jules Verne est maintenant publiée sous le titre En Magellanie.
Le secret de Wilhelm Storitz
La version originale de Jules Verne a été publiée récemment.
Hier et demain
Contient les nouvelles (modifiées) : La Famille Raton, M. Ré-dièze et Mlle Mi-bémol,
La destinée de Jean Morénas (Pierre-Jean), Le Humbug, La journée d'un journaliste
américain en 2889 et L'éternel Adam (Édom).
L'étonnante aventure de la mission Barsac
Le député Barsac est chargé par le gouvernement
français d'entreprendre un voyage d'étude dans la boucle
du Niger afin de déterminer s'il est possible d'accorder le droit
de vote à la population de la région. Plusieurs personnes
se joignent à cette expédition, dont le reporter Amédée
Florence et Jane Mornas, alias Jane Buxton. Jane Mornas-Buxton a un but
bien précis : elle veut prouver que son frère, le Capitaine
Buxton, est innocent des crimes qu'il est accusé d'avoir commis
dans cette région. De nombreux obstacles se dressent devant la troupe
qui finit par se retrouver, bien malgré elle, à Blackland,
une ville secrète située au beau milieu du désert
et contrôlée par un criminel alcoolique, Harry Killer. Quel
est le lien entre Harry Killer, le Capitaine Buxton, l'inexpliqué
cambriolage de la Central Bank de Londres et toutes les embûches
subies par Barsac et ses compagnons ? Avant de mourir, Jules Verne avait déjà
écrit cinq (5) des chapitres de ce livre dont le titre de travail
était Voyage d'études. À partir des notes de
son père, son fils Michel a entièrement rédigé
un roman dont l'intrigue est fort bien ficelée. Le livre a cependant
été publié sous le nom de Jules Verne, d'abord en
feuilleton sous le titre Le dernier voyage extraordinaire, puis
L'étonnante aventure de la mission Barsac, en 1919. Quand il ne se
contente pas de remanier les oeuvres inédites de son père,
Michel Verne montre qu'il est capable d'être intéressant !